Sept ans après le début de la crise : les banques restent des dangers publics !

mardi 10 février 2015, par Plihon Dominique

Le discours officiel, véhiculé par la plupart des médias, est clair : la crise est passée, des réformes salutaires ont été mises en place, les banques vont bien et participent activement au bien-être de la société. Cette vision est contraire à la réalité.

À chacun sa vérité !

Des banques solides ?

Les banques françaises sont « universelles » : elles sont à la fois banques de détail, tournées vers la distribution du crédit et la collecte des dépôts, mais également banques d’investissement, qui utilisent les dépôts de leurs clients – le plus souvent à leur insu – pour opérer sur les marchés et spéculer. Ce qui en fait des banques très risquées et gigantesques : le bilan de BNP Paribas fait 2 000 milliards d’euros, soit l’équivalent du PIB de la France ! A la suite de la crise, les autorités bancaires ont repéré les banques dites « systémiques », jugées les plus dangereuses pour la stabilité du système bancaire international, en raison de leur taille et des relations d’interdépendance existant entre elles. Sur les 29 groupes bancaires systémiques dans le monde, 4 sont français : Crédit agricole, BNP Paribas, Société générale et le groupe BPCE (Banques populaires – Caisses d’épargne). Ce qui place la France au 1er rang dans le monde… ex æquo avec la Chine ! Ces quatre banques systémiques contrôlent la majeure partie de l’activité bancaire en France et font donc du système bancaire français le plus vulnérable potentiellement, donc le plus dangereux dans le monde !

Les banques ne coûtent rien à la société ?

Le patronat bancaire affirme que le sauvetage des banques à partir de 2008 n’a rien coûté au contribuable. Autre contre-vérité ! En 2012, la Commission européenne évalue à 4 500 milliards d’euros les fonds publics mis à disposition des banques européennes, principalement sous forme de garanties. Soit 37 % du PIB de l’Union européenne ! Le plus souvent sans conditions. La France ne fait pas exception. En 2008, l’État mobilise 360 milliards d’euros pour aider les banques nationales, dont 320 milliards de garanties. C’est plus que le budget annuel de l’État français ! Les prêts seront finalement remboursés par les banques. Mais trois ans plus tard, la Banque centrale européenne (BCE), via la Banque de France, est contrainte de prendre le relais pour prêter à nouveau aux banques françaises en manque de liquidités, à hauteur de 232 milliards d’euros. Ce qui fait de nos banques nationales les principales bénéficiaires du soutien de la BCE, juste derrière les banques espagnoles et italiennes.

Mais si on veut évaluer le coût des banques pour les contribuables, il faut aussi regarder du côté de la fiscalité. On constate d’abord que les grandes banques françaises ont un taux d’imposition sur les bénéfices de 8 %, très loin du taux officiel de 33,5 %, ce qui représente un manque à gagner pour l’État de 15 milliards d’euros au cours de la dernière décennie. Mais surtout, on découvre que l’une des activités les plus lucratives des banques est « l’optimisation fiscale », pour leur compte et celui de leurs clients. Les banques françaises sont des acteurs majeurs de « l’industrie de l’évasion fiscale » qui fait perdre au minimum 60 milliards d’euros chaque année au budget de la France. Ce n’est pas un hasard si BNP Paribas, championne dans ce sport, détient plus de 300 filiales dans les paradis fiscaux !

Les banques financent-elles encore l’économie ?

Aujourd’hui en Europe, 10 %, en moyenne, des actifs des banques sont consacrés à des prêts aux entreprises. Et 15 % à des prêts aux ménages. Les 75 % restants se retrouvent surtout en placements sur les marchés financiers. Un quart seulement des actifs des banques sert donc à financer directement les entreprises et les particuliers ! En fait, les banques jouent désormais un simple rôle de « courtier » : elles se contentent de distribuer les crédits (moyennant commissions) qu’elles transfèrent ensuite aux marchés par la titrisation, qui consiste à transformer les crédits en titres négociables. On se dirige ainsi vers le modèle états-unien originate to distribute, qui est encouragé par les autorités françaises et européennes : les banques initient les crédits, prennent des commissions, puis transfèrent les risques aux marchés. Ainsi, les banquiers renoncent progressivement à leur fonction principale, qui est de prêter à l’économie et de gérer les risques. Par contre, ils développent leurs activités spéculatives tous azimuts. Ils se sont ainsi rués sur les produits dérivés, instrument phare de la spéculation. Et c’est à nouveau BNP Paribas qui fait la course en tête : ses activités de marché représentent l’équivalent de 42 % du PIB de la France, contre 2 % pour le groupe Crédit Mutuel. Ses produits dérivés représentent 23 fois la valeur du PIB !

Mettre les banques au service de la société

Les gouvernements successifs ont renoncé à faire de véritables réformes pour stopper cette dérive inquiétante. La principale mesure doit être la séparation totale des activités de banque de détail et de banque d’investissement. Les économistes sont unanimes : la loi Glass-Steagall, votée par l’administration Roosevelt en 1933, a largement contribué à la disparition des crises bancaires aux États-Unis jusqu’en 1999, année où cette loi a été abrogée. Cette mesure a un triple avantage : réduire la taille – et donc le pouvoir – des banques, limiter la capacité de celles-ci à spéculer avec l’argent des épargnants, et renforcer la stabilité du système bancaire.

Assainir le monde des banquiers est une autre priorité. En imposant d’abord le plafonnement des revenus des traders et des dirigeants bancaires, dont les niveaux indécents sont une provocation pour le reste de la société. La gouvernance des banques doit également être réformée. Ces dernières sont exclusivement gouvernées par leurs actionnaires et des dirigeants cupides dont le seul mobile est le rendement financier. Les banques doivent être pilotées de manière démocratique par tous les acteurs concernés par leurs activités – usagers, salariés, représentants de la société civile, actionnaires. Ceux-ci doivent participer à parts égales aux instances de direction des banques. Ce contrôle social des banques est le meilleur moyen de les mettre au service de l’intérêt général. Il est également essentiel que se développent les banques coopératives, éthiques et publiques dont l’objectif n’est pas le pur profit.

Les banques doivent aussi contribuer au budget de l’État, au même titre que toutes les entreprises. Un système de taxation progressif selon la taille des banques, et ciblé en particulier sur les activités spéculatives, est nécessaire. La fiscalité, outil de justice sociale, est aussi un instrument efficace de lutte contre la spéculation, en taxant notamment les transactions à haute fréquence, inutiles et dangereuses. Enfin, il faut, sans délai, mettre fin aux pratiques d’incitation et de soutien à l’évasion fiscale. Obliger les banques à rendre publiques des informations sur leur activité dans les paradis fiscaux et judiciaires, comme le prévoit la loi bancaire de 2013, est insuffisant : il faut interdire toute activité dans ces zones de non-droit qui sont le cancer du système financier international.

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