L’avenir du monde ne peut ignorer l’histoire de l’esclavage

mardi 28 juin 2016, par Mireille Fanon Mendes France *

Le 10 mai a été choisi par l’État comme date de référence pour se souvenir de ce que fut la mise en esclavage. Chaque année, cette période charrie son lot de commémorations, de déclarations, de prises de décisions.
Cette année 2016 n’échappe pas à ce besoin de mettre des mots sur des maux et des souffrances inextinguibles, puisque l’idéologie qui a mené à ce plus grand crime contre l’humanité n’a jamais été remise en cause ; ne s’exprime t elle pas aujourd’hui sous la forme d’une globalisation financière et militaire qui traite les peuples et les populations comme des variables d’ajustement structurel ?

Ce crime contre l’humanité, inauguré par la traite transatlantique, a arraché par la force un nombre jamais égalé d’hommes, de femmes et d’enfants à leur village, leur ville, leur continent. Il s’est déroulé sur le plus long temps historique, de la Renaissance à l’entrée dans la modernité industrielle, et a concerné l’ensemble des continents ; avec lui s’est légalisée la déshumanisation de millions d’êtres humains, la colonisation qui, a, ensuite permis l’instauration du colonialisme comme moyen de piller un contient entier, du sud au nord.

Pour tous les crimes commis, que ce soient le crime contre l’humanité que fut la mise en esclavage, l’extermination des peuples indigènes qui habitaient les territoires où sont arrivés les premiers colons, que ce soient les crimes de guerre commis par les armées coloniales pour maintenir leur pouvoir dans les pays dont elles s’étaient arrogé la souveraineté, les anciennes puissances esclavagistes ou coloniales se sont arrangées avec le droit international et n’ont eu de cesse de le déstructurer afin qu’il serve leurs intérêts. Concrétisant ainsi la colonialité du pouvoir qui habite tous les interstices des pouvoirs dominants.

La communauté internationale, désireuse d’obtenir une structure assurant une justice internationale universelle au cas où les juridictions nationales s’y refuseraient ou ne pourraient assumer un tel face à face, s’est arrangée, dans un entre-soi, pour que la Cour pénale internationale ne puisse exercer « sa compétence qu’à l’égard des crimes (…) commis après l’entrée en vigueur du présent Statut [1]  » et surtout pour qu’il n’y ait aucune reconnaissance des crimes dus à la traite transatlantique, à la mise en esclavage, à la colonisation et au colonialisme. Au sujet de crimes de guerre commis par la France [2], celle-ci a accepté de signer le Statut de Rome en faisant jouer la déclaration de l’article 124 [3].

Ainsi, les puissances coloniales et impérialistes se sont acheté une conduite exempte des crimes commis contre des êtres humains, dont l’extermination des peuples indigènes, la mise en esclavage, la ségrégation raciale, les crimes de guerre durant l’époque coloniale... pour ne citer que ceux-ci.

La France peut, sans se troubler le moins du monde, s’autodéclarer le premier pays défenseur des droits de l’homme, les États-Unis, la plus grande démocratie et bien sûr dans ce sillage, l’État d’Israël s’affirmer la seule démocratie du Moyen-Orient !

Personne ne peut s’élever contre de telles fausses vérités au risque de voir les alliés politiques, intellectuels et médiatiques surgir, vociférer que de tels propos sont mensongers, destructeurs du vivre ensemble et de la cohésion sociale, voire favorisent le terrorisme ; pour conclure, ces parangons de la démocratie finissent par essentialiser ceux qui dénoncent de telles affirmations en les dénonçant comme ennemis des valeurs de la République. Un mensonge de plus ou de moins !

Mais de quoi parlons-nous exactement ? Cette mémoire « occultante » et occultée, cette mémoire réécrite au gré des objectifs de ceux qui dominent, revient à transformer les faits historiques, à les effacer de la mémoire collective et à les gommer de l’espace public. En un mot, ce que proposent les partisans d’une histoire « propre », digne, qui vient nourrir le récit national, c’est de vivre dans un monde schizophrénique. Tout ce qui dérange l’ordre de la domination, tout ce qui relève de la vérité historique, doit être lobotomisé.

Il fallait s’inquiéter lorsqu’aucun accord n’a pu être trouvé pour une date commune pour rappelant au peuple français l’horreur que furent la traite négrière transatlantique et la mise en esclavage, la colonisation et le colonialisme.

Il fallait s’inquiéter lors de l’inauguration du mémorial contre l’esclavage en découvrant, dans le jardin du Luxembourg, qu’il se réduit à deux anneaux s’élevant vers le ciel, dont le dernier est ouvert. Est ce tout ce que méritent les douze millions de personnes déportées et mises en esclavage ?

Il faut s’inquiéter, lorsque dans le storytelling national, Victor Schœlcher est présenté comme l’artisan de l’abolition. N’y a-t-il aucun historien qui ne soit allé fouiller les archives des débats préparatoires au décret de 1848 [4] ? N’oublions pas que quelques années avant cette abolition définitive, Schœlcher, ce grand Victor, dont le corps est déposé au Panthéon [5], voulait un délai de 60 ans avant de rendre leur humanité aux milliers d’êtres humains qui en avaient été privés par la violence, car il ne voyait « (…)  pas plus que personne la nécessité d’infecter la société active de millions de brutes décorées du titre de citoyen ».

Il reviendra sur cette position, mais uniquement poussé par l’image de Cyrille Bissette [6], martiniquais, qui s’est battu bien avant Schœlcher pour l’abolition. Là encore, il y a de quoi s’inquiéter lorsque le récit national obère le rôle fondamental joué par un citoyen martiniquais au profit du citoyen blanc, qui a capitulé sur l’indemnisation des victimes de l’esclavage, car il s’agissait plus d’« émanciper les esclaves, pour sauver les maîtres ». C’était la position affirmée par le ministre de l’économie [7] de l’époque, Hippolyte Passy, « ce qu’il faut, c’est la restauration du crédit qui (…) manque » aux colons. « Voilà la première des nécessités coloniales à laquelle il faut pourvoir. C’est le crédit qui, seul, rendra aux colonies la vie, l’activité ». C’est ainsi qu’une indemnisation fut « allouée aux propriétaires d’esclaves [8] sans réparer les conséquences de ce crime de masse… Il s’agissait de conforter la domination blanche dans les colonies et de doter de moyens nouveaux le capitalisme industriel et financier [9] ».

Mais ce principe qui veut que la victime paie le prix de son aliénation et de son asservissement n’est pas nouveau ; dès 1825, Haïti n’aurait elle pas dû s’acquitter pendant 200 ans d’une dette [10] en paiement de son indépendance ? Plus tard, les États nouvellement libérés du joug colonial n’ont ils pas dû payer une forme d’impôt qui, sous la forme actuelle du pacte néocolonial, oblige encore 14 pays [11] à se soumettre à un certain nombre d’engagements [12] ?

Alors oui, il faut s’inquiéter pour ce manque de mémoire, pour tous ces signes qui manifestent, malgré les grandes dénégations, malgré les références aux droits humains et malgré les amalgames historiques, la permanence de la colonialité du pouvoir et des connaissances, au point que dans certaines villes françaises, sur la même place publique, mais dans des coins opposés, est, d’une part, organisée la commémoration de la victoire du 8 mai 1945, et d’autre part, celle du massacre de Sétif [13]. Les deux faces d’une même armée qui a aussi tué à Madagascar [14] !

Dès lors, plus rien n’étonne lorsque des historiens [15], dont certains assument d’être issus de la traite négrière transatlantique, affirment qu’ils sont contre une société où des citoyens sont traités de manière différente ; certes, on ne peut qu’adhérer à ce principe ; mais oublient-ils qu’en 1789, au moment de la première Constitution, des milliers de citoyens français n’étaient toujours considérés que comme des biens meubles ?

Il leur faudra attendre 1794 [16] pour que la première abolition leur ouvre les portes d’un début de citoyenneté ; Bonaparte, furieux des troubles ayant cours à Saint-Domingue, réintroduira l’esclavage en 1802 [17]. « La cohorte innombrable de tous ces opprimés qui, pendant des siècles, avaient souffert de la servitude [18] » devra attendre 1848 pour sortir de la très grande nuit de la déshumanisation et deviendra, dès ce mois d’avril 1848, la nouvelle cohorte des travailleurs précaires n’ayant d’autre choix que de continuer à travailler sur les plantations de leurs anciens maîtres.

Pourquoi certains des historiens oublient-ils aussi que la traite transatlantique n’a rien à voir avec la traite transsaharienne, tout comme la mise en esclavage n’a rien à voir avec l’esclavage pratiqué en temps de guerre ou avec les formes contemporaines de l’esclavage ?

Vouloir réduire les effets et les conséquences de l’un, en vue de rendre plus acceptable ce crime contre l’humanité ou de ramener l’un à l’autre, revient à participer à l’entreprise de colonialité du savoir et à maintenir le pouvoir dans son racisme structurel et institutionnel. Nous sommes loin d’une nécessité de libération de l’aliénation. De tels propos participent, malheureusement, à la subjugation des citoyens, arme favorite des pouvoirs pour se maintenir, à moindre effort, en place.

Au regard de l’instrumentalisation de la mémoire, voire du négationnisme, qui entoure la traite transatlantique et la mise en esclavage, on ne peut qu’adhérer à l’affirmation de Pascal Blanchard, « la mémoire sans histoire, c’est une catastrophe ».

C’est pour cela que l’inauguration d’une « Fondation Esclavage et Réconciliation » [19] suscite quelques questionnements.

En filigrane, on peut voir la référence faite aux commissions « Vérité et Réconciliation » qui ont tenté de négocier les crimes de l’apartheid au nom d’une idéalisation de la nation arc-en-ciel. Mais il y avait au moins l’impérieuse nécessité de se confronter à son bourreau avant de passer à la construction d’une possible réconciliation. L’Afrique du Sud est-elle parvenue à la réconciliation entre les deux mémoires de l’apartheid, celle des trop nombreuses victimes et celle de ceux qui ont perpétré ce crime basé sur la violence de la ségrégation raciale ?

La Fondation Esclavage et Réconciliation, qui s’est constituée « à l’initiative du CM98 [20], des associations citoyennes », dont « Tous créoles [21] », « des personnalités, des entrepreneurs et intellectuels originaires de l’Outre-mer », présente ses membres comme descendants d’esclaves [22], de colons [23], d’engagés indiens [24] et a décidé « de s’engager dans une démarche déterminée de Réconciliation ».

Pour Tous créoles, que signifie la volonté de définir la population des Antilles par « communauté créole antillaise » ? N’est ce pas l’utilisation d’une expression qui masque la volonté de contrôler et d’assurer la direction politique des composantes de la société ? Faisant cela, les animateurs de ces associations et fondations, ainsi que le précise Michel Giraud, orientent les appartenances ethniques, culturelles et linguistiques afin qu’elles deviennent seulement « une représentation généalogique de l’identité [25] ». Mais n’est ce pas tout simplement une façon de procéder au blanchissement mental d’une société qui pourrait construire de l’en-commun pour peu que les lignes d’identité ne soient pas utilisées à des fins de domination ?

Que représente le fait d’amalgamer descendants d’esclaves, colons, engagés indiens ? Cela revient à considérer que les éléments de la racialisation basée sur l’afrophobie, à laquelle s’ajoute, dans certains territoires, l’islamophobie, doivent être ignorés, mieux, mis sous le tapis, non pas de la part de ceux qui dominent mais de la part de ceux qui sont dominés. On est en plein dans une entreprise d’assimilation et d’intégration basée sur l’instrumentalisation du multiculturalisme.

Ce même jour, dans le jardin du Luxembourg ont été annoncées deux créations, l’une concerne une Fondation pour la mémoire de l’esclavage, de la traite et des abolitions ; cette fondation donnerait au Comité national pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage, une possibilité de trouver un prolongement ; en effet, le Président affirme qu’il « a vocation à se transformer dans une Fondation pour la mémoire de l’esclavage, de la traite et des abolitions. Le Comité deviendra son conseil scientifique [26]  ». La mission de préfiguration sera présidée par Lionel Zinzou [27]

Signalons que les mis en esclavage durant la traite transatlantique n’ont pas été uniquement capturés au Bénin…

L’autre, l’ouverture d’un musée sur l’esclavage à la demande de quatre organisations, dont le CRAN [28], SOS-Racisme, la LICRA [29] et le CRIF [30], il y en a certainement d’autres mais dans les communiqués de presse, elles n’apparaissent pas. Avant de s’en réjouir, on doit s’interroger sur l’histoire qui y sera racontée et sur la scénographie adoptée.

Ce musée sera t il uniquement dédié à la traite négrière transatlantique, qui a la particularité d’être un rouage de l’accumulation du capital, et à la mise en esclavage, ou bien les esclavages transsaharien et européen –« qui n’ont jamais pu extraire de leurs captifs une plus-value comparable à celle qui s’obtint avec le nouveau monde [31]  »- viendront ils tempérer l’horreur de ce crime contre l’humanité, unique par son ampleur et par sa durée, qui frappa douze millions de personnes et les continents de l’Afrique, de l’Asie et de l’Amérique, du nord au sud, par la seule volonté prédatrice de l’Europe ?

Il est fort à parier que seront organisés des amalgames dans le seul but de cacher les responsabilités européennes, dans une tentative déclarée « de mieux comprendre le passé pour construire l’avenir  » afin de « construire un récit commun [32] ».

Que viennent faire, dans ce projet, des organisations [33] dont l’objet affiché et sans cesse revendiqué n’a jamais été la défense des Afro descendants, des Africains racisés victimes d’afrophobie et d’islamophobie ?

Cette tentative de rapprochement ne peut faire oublier leur position, lors de la conférence internationale de Durban sur le racisme, la xénophobie, la discrimination raciale et l’intolérance associée ; leur opposition, lors de la rédaction de la Déclaration et du plan d’action de Durban [34], à toute mention des réparations ; ce qui a été facilité par l’incurie des États, d’une part, à faire histoire commune sur la traite négrière, la mise en esclavage, la colonisation et le colonialisme et d’autre part, à trouver une voie pour réparer [35] les erreurs du passé.

On peut, dès lors, s’interroger sur ces relations entre toutes ces organisations ; certes, elles ne sont pas nouvelles : dès 2010, Mediapart attirait l’attention sur un accord trouvé entre la LICRA [36] et le CRAN [37] et Brice Hortefeux, alors ministre du gouvernement. Ces mêmes organisations se sont encore rencontrées, au moment du mariage pour tous.

Il est curieux de considérer que de l’en-commun puisse être construit en mettant ensemble les descendants de victimes et les descendants des bourreaux, ou en essayant de faire passer, par le même filtre, la question de la mémoire à propos des deux crimes majeurs des siècles précédents. On est encore plus étonné de voir prise, toujours en ce jour du 10 mai, la décision de créer deux commissions d’historiens « sur des sujets sensibles  », l’une [38] « à propos des événements qui avaient agité les Antilles comme l’on disait, en 1959, en 1962 et en 1967, pour qu’on puisse tout connaître [39] de ces événements », l’autre [40] « à propos de ces enfants de la Réunion qui furent placés, que dis-je, déplacés dans l’Hexagone et qui demandent à leur tour justice à la République ».

Étonné, car les raisons de ce que le Président identifie comme événements ayant « agité les Antilles », n’ont jamais été sérieusement étudiées, pas plus d’ailleurs que les conséquences. Tout cela est passé sous silence dans le récit national. Informé du fait que les archives relatives à ces tragiques événements et en particulier à ceux de mai 1967, pour l’heure classées « secret défense », vont être déclassées en 2017, le président a-t-il voulu prendre les devants et assurer un récit « policé » d’un acte de violence d’État qui a vu plus de 100 personnes être assassinées [41] dans les rues ? Ce qui a mis le feu à la Guadeloupe est un acte de racisme racialisant [42] ayant touché une personne racisée, handicapée et pauvre.

La seconde commission porte sur les quelque 1600 enfants réunionnais, abandonnés ou non [43], déportés en France, sous la responsabilité de Michel Debré, alors député de la Réunion, se sont vus dépossédés d’eux-mêmes « par des puissances hégémoniques qui perpétuent les formes de l’oppression coloniale [44] ».

Jusqu’à aujourd’hui, il y a une réelle difficulté à écouter des récits d’une déshumanisation de Réunionnais au prétexte de faire accéder les enfants à une meilleure vie. Leur déportation ne fait-elle penser à celle vécue par des millions de personnes déportées de leur continent ? Cette violence d’un acte illégal n’aura comme écho, dans l’enceinte parlementaire, que le vote d’une résolution proposée par le groupe socialiste. Elle n’a de visée que mémorielle, loin de la reconnaissance d’un crime commis par l’État français en violation des droits de l’enfant identifiés par la Convention internationale des droits de l’enfant [45], même si cette dernière a émergé plus de vingt ans après la déportation de ces jeunes Réunionnais.

Ces deux commissions concernent des actes commis par l’État, ne serait il pas temps d’interroger la responsabilité de l’État plutôt que de vouloir, une fois encore, privilégier le mémoriel face à l’élaboration d’un récit national assumé ?

Plus rien n’étonne, nous sommes à l’heure des mensonges, des arrangements et des réécritures. L’arrogance domine. Rappelons nous de la réaction de David Cameron, lors de sa visite à la Jamaïque [46], alors qu’interviewé par un journaliste anglais, il affirmait que « this is about the future relationship and about what we should be doing together economically in terms of trade and investment and this significant infrastructure fund I am announcing which will make Britain the biggest bilateral donor in the Caribbean by quite a long way. So that is what the visit is about, it’s talking about the future » alors que la CARICOM [47] avait officialisé sa démarche légale en réparations [48] contre le Royaume-Uni, la France et les Pays-Bas.

De quel futur peut il s’agir, lorsque les États anciennement colonisateurs continuent d’avoir une attitude d’oubli et de condescendance ?

Mais aussi, quel futur pour les personnes d’ascendance ou d’origine africaine dans les pays où ils vivent, alors que les États, face aux problèmes sociaux et économiques qu’ils traversent et à l’impossibilité du pouvoir d’y répondre de manière adéquate, essentiellement par refus politique, utilisent des courroies de transmission pour rendre plus acceptables des politiques étatiques se proposant de relayer une idéologie et affichant l’idée qu’il y a une seule et unique bonne façon de traiter de la question de la mémoire, et qu’il y a de bons et de mauvais citoyens ? Et l’on nous parle de vivre ensemble, de faire monde mais « celui qui hésite à me reconnaître » ne s’oppose- t- il pas « à moi [49] » ?

Il est fort à parier que certains seront bientôt, au vu de ces amalgames culpabilisants, déclarés ennemis de la République, au prétexte du refus exprimé d’entrer dans ce grand fourre-tout constitué, unilatéralement, par la « communauté créole antillaise » et par la communauté prête à s’arranger avec la mémoire en vue d’une supposée réconciliation. Ils seront accusés de ne pas respecter les principes basés sur la relation dominant/dominés. Tout comme seront déclarés inaptes au vivre ensemble ceux qui s’élèvent contre une mémoire aseptisée et contrôlée.

Vouloir considérer qu’aux Antilles tout se réduit à la créolité revient à ne toujours pas reconnaître leur place aux descendants d’esclaves, pas plus qu’aux descendants des peuples indigènes, qu’on les appelle Kalinas, Tainos, Arawaks ou Indiens caraïbes. Vouloir faire entrer les mémoires dans le même cadre revient, une fois encore, à conforter les structures de l’invisibilité dont sont victimes les Afro descendants et les Africains partout dans le monde.

Cette volonté de faire égaux par le gommage des différences pour que ne reste plus que l’aspect le plus policé, dans lequel les blancs, qu’ils soient descendants des propriétaires d’esclaves ou blancs venus, ainsi qu’ils le disent, de la métropole, peuvent se reconnaître et exister, oblige ceux qui sont de l’autre côté de l’histoire à la gommer, ou en tout cas à la ‘romantiser’ pour que ne restent que les aspects aptes à être scénarisés lors de parcours touristiques.

Il s’agit, et avec la meilleure volonté du monde, d’une nouvelle violence faite à la mémoire de nos ancêtres. Il s’agit, ni plus ni moins, de continuer à maintenir « les spectateurs écrasés d’inessentialité [50] ».

L’histoire n’est pas finie et se répète, avec quelques variations, inlassablement. Les dominés, structurellement et institutionnellement, sont traités de la même façon, nos sociétés n’ayant pas cessé de se référer à l’idéologie qui a conduit à classer les êtres humains à partir du concept scientifiquement faux de race. Les inconscients collectifs sont si profondément marqués par cette croyance qu’il faudrait plus qu’une réconciliation pour changer le paradigme de la domination raciale.

S’il ne s’agit pas de se confronter à son bourreau, il s’agit de se confronter à l’histoire telle qu’elle s’est écrite au cours de ces quatre siècles et de n’en tolérer aucune digression, aucun amoindrissement, aucune réécriture, au prétexte qu’il faut passer à autre chose, les mis en esclavage par la force étant tous libérés depuis longtemps. Ce sera réalisé, ainsi qu’annoncé dans le communiqué de lancement de la Fondation Esclavage et Réconciliation, en « développ(ant) des sociétés solidaires, dynamiques et non conflictuelles pour les générations futures » ; pour cela « la fondation s’attachera à accompagner les initiatives généalogiques, éducatives et culturelles (…), à amplifier les travaux historiques anthropologiques, culturels et cinématographiques (…) et à promouvoir un tourisme mémoriel (…) » [51].

Il y a un total silence sur les politiques racialisantes mises en place par le pouvoir, qui font que les racisé-e-s ne peuvent sortir de cette assignation. Il y a une totale méconnaissance de la résolution [52] de l’ONU lançant la Décennie internationale pour les personnes d’ascendance africaine qui, ainsi que le confirme le secrétaire général de l’ONU, ’ sont parmi les plus touchées par le racisme » et qui « trop souvent, (…) font face au déni des droits fondamentaux tels que l’accès aux services de santé de qualité et à l’éducation [53]. ’

Peut-on parler de réconciliation, alors qu’il n’y a aucune reconnaissance historicisée publique de cette tragique histoire, aucune reconnaissance de la situation de précarité et de dangers dans laquelle se trouvent les personnes d’ascendance africaine, violence policière, enfermement de masse, délit de faciès… ? Peut on parler de réconciliation alors que rien n’a été organisé pour que les formes du colonialisme cessent d’être appliquées à la place de la sociabilité ?

Il faut relire Frantz Fanon, qui engage le colonisé à s’arracher à tout ce qui le relie au colonialisme, or il est malheureux que nombre d’initiatives n’ont pour objectif que d’engluer encore plus le dominé dans une situation qui le maintient sous la férule du colonialisme.

Il faut cesser de mettre en place des tentatives d’évitement, d’invisibilisation de cette période, auxquelles doivent être ajoutées les situations d’invisibilisation dont est victime la grande majorité des personnes d’ascendance africaine ? N’est-ce pas toujours retarder la remise à l’endroit de ce qui a dérangé l’ordre du monde, entre autres en transformant le continent africain, alors vaste espace transnational de circulation, en un espace d’enfermement caractérisé par les frontières et les camps ?

La reconnaissance ne peut se réaliser que par la remise à l’endroit de l’ordre dérangé par la violence coloniale.

Le fait d’avoir mis sur le même plan « esclavage » et « réconciliation » indique une orientation qui revient à faire porter aux victimes le poids de cette réconciliation. Il est curieux de constater que pour les crimes coloniaux, ayant pour ligne organisatrice l’usage de la « race » comme moyen de domination, c’est toujours aux victimes de se réconcilier avec leurs bourreaux, alors que, pour d’autres commissions de crimes, la justice passe avant une possible réconciliation.

Dans cette équation, la dynamique de la responsabilité/culpabilisation n’a pas changé, ainsi il n’y a pour les dominants aucun risque que « les derniers deviennent les premiers [54] ».

Ce qui étonne à la lecture des constats et des objectifs de cette nouvelle Fondation, c’est qu’il y est question de « mémoire conflictuelle de l’esclavage ».

Non, cette mémoire n’est pas conflictuelle.

Elle demande juste à être identifiée, reconnue, analysée, aussi bien sur les plans historiques, sociaux, économiques que juridiques et politiques afin que soient reconnues les nombreuses conséquences dévastatrices qui continuent d’affecter les personnes d’ascendance africaine, avec en premier lieu une afrophobie [55] qui vient les racialiser sur la base de la pigmentation de leur peau, de la nature de leurs cheveux, de l’épaisseur de leurs lèvres ou de la forme de leur nez, ce qui les marginalise, les exclut, les stigmatise et les laisse à côté, sans jamais pouvoir faire partie de, et encore moins sans jamais pouvoir briser le plafond de verre [56] auquel elles viennent se cogner.

Le pouvoir rend la mémoire conflictuelle lorsqu’il refuse que soit écrite l’Histoire et qu’il accepte, sans vergogne, de la transfigurer pour la faire adhérer à ses projets de domination.

Dès lors, les Afro descendants n’ont d’alternatives que de revendiquer le droit à résister à ce projet porté par la « Fondation Esclavage et Réconciliation » – initiative privée – et par ses alliés, tout comme à celui annoncé le 10 mai, dans l’enceinte du jardin du Luxembourg [57] concernant la « Fondation mémoire et esclavage » – initiative publique – ou alors y a-t-il des ponts prévus entre ces deux décisions ? et à celui portant sur un musée de l’esclavage.

Peut-on, conceptuellement et politiquement, adhérer au projet d’un musée, « la plupart des tentatives visant à mettre en scène l’histoire de l’esclavage transatlantique, dans les musées existants, ont brillé par leur vacuité  » ainsi que le précise, avec clairvoyance, Achille Mbembé [58] ; il poursuit en précisant que dès lors que « l’esclave entrerait dans un musée tel qu’il existe de nos jours, alors le musée signerait sa propre fin et il faudrait, en l’occurrence, le transformer en quelque chose d’autre (…) » .

Oui, « le colonisé qui résiste a raison [59]  », tant que son humanité ne sera pas pleinement, et sans condition, reconnue.

À cela doit s’ajouter l’obligation de la construction d’une mémoire historique commune sur les faits réels, argumentés et documentés. Ces éléments sont les seuls à même de construire de l’en-commun, ce qui ne peut passer que par la volonté politique de remettre à l’endroit ce qui a été dérangé par la traite transatlantique, la mise en esclavage, la colonisation et le colonialisme.

C’est bien ce qu’attendent les millions d’Afro descendants et d’Africains partout dans le monde [60], à savoir que soient mises en place les conditions de « la création d’hommes nouveaux », sachant, comme le souligne Frantz Fanon, que « la chose » colonisée devient homme par le processus même par lequel elle se libère (…) [61] ». Cela ne pourra advenir que si les États, tous les États, et les institutionnels décident formellement de mettre en place le paradigme de la reconnaissance.

C’est ce que font les paysans guadeloupéens, descendants d’esclaves et descendants des Kalinas, qui revendiquent, par une procédure judiciaire [62], le droit à la souveraineté sur les terres n’ayant jamais appartenu aux colons, n’oublions pas que le droit de propriété ne vaut que s’il a été acquis légalement, par vente libre, alors que l’acquisition des biens d’autrui par la violence armée est un crime. Ils demandent que soient réellement instaurées les conditions d’une justice réparatrice.

10 mai 2016

Notes

[1Article 11, Compétence ratione temporis, Statut de Rome de la CPI

[2Introduisant une exception qui permet à un État de refuser la compétence de la CPI pour des crimes de guerre pendant une période de 7 ans. En obtenant cette réserve lors des négociations, en 1998, la France, seul pays avec la Colombie, à avoir plaidé pour, se trouvait dans une position anormale. Cet état de fait a été annulé en août 2008. Id

[3Article 124, Disposition transitoire : « Nonobstant les dispositions de l’article 12, paragraphes 1 et 2, un État qui devient partie au présent Statut peut déclarer que, pour une période de sept ans à partir de l’entrée en vigueur du Statut à son égard, il n’accepte pas la compétence de la Cour en ce qui concerne la catégorie de crimes visée à l’article 8 lorsqu’il est allégué qu’un crime a été commis sur son territoire ou par ses ressortissants. Il peut à tout moment retirer cette déclaration. Les dispositions du présent article seront réexaminées à la conférence de révision convoquée conformément à l’article 123, paragraphe 1.

[427 avril 1848

[5Le Sénat, un siècle après le décret d’abolition, prendra la décision de transférer son corps au Panthéon. C’est Gaston Monnerville qui lira « (l)e texte de loi, bref et clair, qui consacrait l’immortalité de Schœlcher et d’Éboué, j’étais violemment ému. Je voyais surgir autour de moi, et monter, comme en une résurrection subite, la cohorte innombrable de tous ces opprimés qui, pendant des siècles, avaient souffert de la servitude, et qui, par ma voix devenue la leur, criaient en cet instant : Schœlcher a bien mérité de l’Humanité ».

[6Voir les notes de références citées par wikipédia.

[7Hippolyte Passy, plusieurs fois ministre de l’économie, entre autres, dans le premier cabinet de Louis Napoléon Bonaparte (20 décembre 1848-31 octobre 1849). Rappelons que lors des débats portant sur l’abolition, il avait proposé une abolition graduelle de l’esclavage : liberté des enfants à la naissance et affranchissement par rachat

[8Article 5 du décret 27 avril 1848 mis en œuvre par la loi n° 285 du 30 avril 1849.

[9« Quand le soleil se couche sur une cause légitime (…), l’aube qui se lève (…) est toujours une promesse de son accomplissement », Mireille Fanon Mendes France, paru sur le site de la Fondation Frantz Fanon.

[10La dette a été acquittée jusqu’en 1952.

[11Depuis 1961, Bénin, Burkina Faso, Guinée-Bissau, Côte-d’Ivoire, Mali, Niger, Sénégal, Togo, Cameroun, République centrafricaine, Tchad, Congo-Brazzaville, Guinée équatoriale, Gabon.

[12Les obligations issues du Pacte néocolonial sont :

  • Les pays africains doivent déposer leurs réserves monétaires nationales en France où la banque centrale les gère.
  • Chaque pays doit envoyer un rapport annuel en France sur le montant de son solde et de sa réserve.
  • Obligation d’utiliser le Franc CFA, reliquat de la France coloniale.
  • La France a le droit d’acheter toutes les ressources naturelles de la terre de ses ex-colonies.
  • Priorité est donnée aux intérêts et aux entreprises français lors de l’attribution des marchés publics.
  • Les Africains doivent envoyer leurs officiers supérieurs en formation en France qui fournit aussi l’ensemble des équipements militaires.
  • La France a le droit de pré-déployer des troupes et d’intervenir militairement pour défendre ses intérêts.
  • Les pays ont obligation de faire du français la langue officielle, y compris dans le secteur de l’éducation.
  • Le pays doit renoncer à entrer en alliance militaire avec tout autre pays, sauf autorisation de la France.
  • Le pays a l’obligation de s’allier avec la France en situation de guerre ou de crise mondiale.

[13Selon les historiens, 15.000 morts à Sétif, Guelma, Kherrata et dans tout le Constantinois...

[14Insurrections malgaches de 1947 et 1948, pendant lesquelles, selon les historiens, de 11 000 à 100 000 personnes furent tuées.

[15Je pense particulièrement à Frédéric Régent.

[16Loi du 4 février 1794, abolition partielle, la Réunion a tout fait pour la repousser et la Martinique l’a refusée.

[17Loi du 20 mai 1802 (30 floréal an X).

[18Voir note 5.

[19La Fondation n’a pas de site propre, l’annonce de cette création est relayée sur le site de « Tous créoles » et du « CM98 ».

[20Comité marche du 23 mai 1998.

[22Serge Romana, Professeur de médecine, Président de l’association CM98 ; Serge Guézo, prince d’Abomey ; Marie-Josée Alie, Artiste, Journaliste ; Luc Laventure, Journaliste ; Frédéric Régent, Historien, voir note 10 ; Viviane Rolle-Romana, Psychologue ; Judes Galli, Chef d’entreprise ; Emmanuel Gordien, Médecin, Jean-Luc Cafournet, Chef d’entreprise, Daniel Marival, journaliste et chef d’entreprise.

[23Eric de Lucy de Fossarieu, Chef d’entreprise (voir le profil) ; Roger de Jaham (famille arrivée en Martinique en 1635), voir son portrait) ; Bernard Hayot, chef d’entreprise, fondateur du Groupe Bernard Hayot (supermarchés, magasins de sport, de bricolage dans les DOM, en Nouvelle-Calédonie, au Maghreb, en Asie), 185e fortune de France.

[24José Gaddarkhan, chef d’entreprise.

[25La créolité : une rupture en trompe-l’œil [article] ; Michel Giraud, Cahiers d’études africaines, Année 1997 Volume 37 Numéro 148 pp. 795-811.

[26Lire le discours prononcé par François Hollande sur le site de l’Élysée.

[27Économiste, banquier, homme d’affaires et ancien premier ministre du gouvernement , il a pris part en 2005 à la création d’une fondation présidée par sa fille, destinée à favoriser les activités artistiques et depuis 2015, il dirige AfricaFrance, intitiative lancée par la France et soutenue par le Quai d’Orsay et le MEDEF pour relancer les relations économiques entre la France et l’Afrique. http://www.rfi.fr/hebdo/20160325-benin-presidentielle-zinsou-erreurs-campagne

[28Conseil représentatif des associations noires.

[29Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme.

[30Conseil représentatif des institutions juives de France.

[31Achille Mbembé, Politique de l’inimitié, Antimusée, p.155 et suivantes, Éditions La Découverte, mars 2016

[33La Licra et le CRIF

[35Pierre Hazan, Juger la guerre, juger l’histoire. Du bon usage des commissions Vérité et de la justice internationale (Paris, PUF, 2007).

[36Dans le cadre de la dernière assemblée générale de « Tous créoles », la LICRA vient de proposer d’ouvrir une antenne de son association aux Antilles, ce qui a été acté.

[38Dont le président est Benjamin Stora.

[39Le rapport devrait être remis à l’automne 2016.

[40Présidée par Philippe Vitale.

[41Les principaux responsables de cette tragédie, commissaire Canalès, préfet Bollotte, Pierre Billotte, ministre de l’Outre-Mer, Christian Fouchet, ministre de l’Intérieur, Pierre Messmer, ministre des Armées, et surtout Jacques Foccart, alors secrétaire de l’Élysée aux Affaires africaines et malgaches.

[42Le 20 mars 1967, Srnsky, un Européen, propriétaire d’un magasin de chaussures à Basse-Terre interdit à Raphaël Balzinc, cordonnier ambulant infirme, de passer sur le trottoir qui borde sa devanture, lâche sur lui son berger allemand « Dis bonjour au nègre ! ». Balzinc, renversé et mordu, est secouru par la foule, tandis que Srnsky, du haut de son balcon, nargue et invective les passants et même les policiers guadeloupéens qui sont accourus.

[43Lire, entre autres, l’article de Slate, mais aussi le livre de Valérie Magdelaine-Andrianjafitrimo, Les « déportés » de la Creuse : le dévoilement d’une histoire oubliée.

[44Voir Valérie Magdelaine-Andrianjafitrimo, « Le “petit” Créole et le monde.

[45Votée par l’Assemblée générale de l’ONU, le 20 novembre 1989.

[461er octobre 2015.

[48À l’issue d’un sommet de deux jours 10-11 mars 2014, quinze pays membres de la CARICOM ont acté dans un plan en dix points le fait de demander réparations aux nations européennes ayant pratiqué l’esclavage, la traite négrière et la colonisation.

http://www.sxminfo.fr/73898/12/03/2014/caricom-15-etats-de-la-caraibes-officialisent-leur-demande-de-reparation-au-titre-de-lesclavage-et-de-la-colonisation/#ixzz48j2cJOdP

[49Frantz Fanon, Le nègre et la reconnaissance, Peau noire, masques blancs, éditions du Seuil, 1952

[50Frantz Fanon, De la violence, Les Damnés de la terre, éditions Maspero, 1961.

[52Résolution 68/237, ayant pour objectif de promouvoir le respect, la protection et la réalisation de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales des personnes d’ascendance africaine, comme le prévoit la Déclaration universelle des droits de l’homme ; de promouvoir une meilleure connaissance et un plus grand respect de la diversité du patrimoine, de la culture et de la contribution au développement des sociétés des personnes d’ascendance africaine et d’adopter et de renforcer les cadres juridiques internationaux, régionaux et nationaux, conformément à la Déclaration et au Programme d’action de Durban et à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, et de veiller à les mettre en œuvre intégralement et effectivement ; http://www.un.org/fr/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/RES/68/237 http://www.un.org/en/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/RES/69/16&referer=/english/&Lang=F

[53Intervention de Ban Ki Moon, lors de la Journée internationale des Nations Unies pour le souvenir de la traite négrière et de son abolition, lundi, 24 Août 2015.

[54Voir note 56.

[55Lire à ce sujet, le rapport réalisé par ENAR (European network against racism), Afrophobia in Europe-ENAR shadow report 2014-2015 ; http://www.enar-eu.org/Launch-of-ENAR-s-2014-15-Shadow-Report-on-Afrophobia-in-the-European-Union

[56Voir à ce propos le documentaire « Trop noire pour être française », Isabelle Boni-Claverie, http://www.boniclaverie.com

[57Voir note 28.

[58Achille Mbembé, politique de l’inimitié, Antimusée, p.155 et suivantes, Editions La Découverte, mars 2016.

[59Frantz Fanon, Ecrits sur l’aliénation et la liberté, page 445, Editions La Découverte, 2015.

[60Voir le mandat du groupe de travail d’experts de l’ONU sur les personnes d’ascendance africaine, http://ohchr.org/EN/Issues/Racism/WGAfricanDescent/Pages/WGEPADIndex.aspx

[61Voir note 56.

[62Voir note 9.

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